AFFAIRE IMAM NANFO DIABY, LES CONSECRATIONS DE LA REPUBLIQUE !
Plusieurs médias de la place rapportent que l’imam N’ko, Nanfo Ismaël Diaby a été arrêté, puis écroué avec des compagnons, à la suite d’une plainte en lien avec des prières musulmanes organisées en langue maninka.
Dans l’hypothèse où les faits, tels qu’ils ont été rapportés, se vérifiaient, ce seront plusieurs abus aux principes républicains et aux libertés individuelles qui auront été commis.
Primo, la première atteinte touche à la laïcité. Fondement de la république, la laïcité démarque le civil et le religieux et consacre la neutralité de l’Etat dans les affaires confessionnelles. Ainsi, dans la république laïque, la puissance publique n’a pas à s’immiscer dans l’administration des confessions religieuses encore moins à faire imposer ou sanctionner des discours et des actions qui sont conformes ou non à l’orthodoxie d’une religion ou une autre. La « Res publica » (chose publique) est l’espace dans lequel s’exerce toutes les croyances au monde suivant tels rites ou tels autres dans l’abstention totale de l’Etat.
Secundo, la liberté de culte consacrée comme une des libertés individuelles et fondamentales a été abusée. Dans la république laïque, il est libre de croire ou de ne pas croire et d’exercer librement sa foi religieuse suivant les rites voulus. La liberté de religion dispose le droit de chaque citoyen à pratiquer, comme il l’entend sa foi ou de ne pratiquer aucune croyance.
Tertio, les dépositaires de la force publique ont commis des manquements aux normes de procédure pénale et du droit pénal. Le fondement de l’action pénale repose sur des soupçons persistants d’action ou de rétention délictuelle d’un citoyen. Autrement, c’est l’esprit du principe de la légalité des délits qui dispose : « Nullum crimen, nulla poena sine lege » (il n’y a ni crime, ni peine, sans loi) qui est ignoré. Or, les chefs d’accusation, sauf à apporter la preuve du contraire, tels qu’entendus, dans cette affaire, ne sont pas des comportements incriminés et punis par le législateur.
Par contre, à regarder de près, l’attitude de Nanfo Diaby et cie qui croient, contre l’orthodoxie musulmane ainsi que contre quasiment tous les avis des exégètes et savants de l’Islam qu’il est possible de prier dans une langue, autre que celle de la version de la langue arabe de la révélation du Saint Coran relèverait plutôt de l’hérésie.
Dans ce cas, il revient aux autorités de l’islam notamment, celles de la ville de Kankan, de le radier des effectifs de l’imamat et de l’interdire de séjourner dans les lieux de cultes musulmans.
Mais, autre chose, à l’ère même de la prolifération des sectes religieuses et ce, dans toutes les religions au monde y compris l’Islam, l’hérésie elle-même devient un concept dynamique dont les contours sont difficilement saisissables. Puis que l’orthodoxie, par exemple, au regard des courants (Sunnite et Chiite) de l’Islam, devient dans une certaine mesure, une variable, selon que l’on appartienne à un courant ou à l’autre. Le musulman chiite est un hérétique aux yeux du sunnite et vice-versa. Il en va de même pour le Christianisme et les autres croyances.
Alors, puis que l’hérésie n’est pas une infraction à la loi pénale, du moins en droit guinéen, et que cette matière est exclusivement réservée au domaine du religieux, il n’y a pas de fondement à l’action de l’Etat laïc contre Nanfo Ismael Diaby et cie.
A ce titre, les poursuites doivent immédiatement prendre fin, à moins qu’on puisse, sous un régime juridiquement rigoureux, apporter la preuve du contraire.
Bangaly KEITA